D69 - Club de Saintonge

Elle se dit « Fille de Simone de Beauvoir », fille spirituelle qui n’adhère pourtant pas à toutes les prises de position du « Castor », née Bleustein-Blanchet, le 5Mars 1944. Elle est mariée et mère de trois enfants.

Comme Simone de Beauvoir, elle est agrégée de philosophie, elle se revendique ouvertement féministe. Membre du Comité de Parrainage de la Coordination Française pour la décennie de la Culture de Paix et de non violence.

Elle s’oppose à tout symbole d’oppression, notamment de la condition féminine. Ainsi, elle s’oppose au port du voile, défend la laïcité. Elle dit aussi ; » Il faut combattre le racisme, l’antisémitisme comme le racisme antimusulman, on doit pouvoir parler de toutes les religions.

Elle a défendu Charlie Hebdo dans le procès ouvert le 7 Février 2007.

Cette philosophe, spécialiste du XVIIIème siècle, a observé très finement les mœurs et les mentalités du siècle des Lumières et, par ses enquêtes très précises a pu en montrer l’évolution au cours des trois siècles qui ont suivi. La condition féminine a longuement retenu son attention.

Nous devons à Elisabeth Badinter, des écrits valorisant les femmes, montrant le chemin parcouru pour la place de celle-ci dans notre mode de vie, dans la conception de la maternité, de l’éducation des filles, dans les rapports entre hommes et femmes.
 
Dans L’amour en plus, paru en 1980, elle met en évidence que l’amour maternel n’est pas aussi « inné » que d’aucuns l’imaginent mais qu’il relève du comportement de la société et varie selon les époques et le milieu social, saluant au passage les écrits de Louise d’Epinay dont les Conversations d’Emilie.

Elisabeth Badinter reviendra sur Louise d’Epinay, novatrice en matière d’éducation des filles dans Emilie, Emilie ou l’ambition féminine au XVIIIe siècle (1963), où elle étudie le parcours de deux femmes ambitieuses  qui refusaient les contraintes et limites imposées par la société ; dont l’une fut la brillante Emilie du Chatelet, mathématicienne, physicienne, parlant d’égale à égale avec Maupertuis, traductrice de l’œuvre de Newton, compagne de Voltaire qui admirait ses travaux, 1ère femme reconnue par l’ Académie des Sciences. L’autre fut Louis d’Epinay, amie d’un temps de Rousseau mais surtout de Grimm, elle imagina pour sa fille et pour sa petite fille Emilie une éducation novatrice, critique de l’Emile de Rousseau et qui ouvre la voie aux mères de la fin du XIXe et XXe siècle.

Dans L’un est l’autre (1986), elle étudie les rôles entre les hommes et les femmes partant de la complémentarité qui peut être réussie ou faire place à l’oppression pour arriver à notre actuelle égalité qui est pour elle une mutation qui remet quelque peu en question notre identité et qui effraie certains.

Dans XY l’identité masculine (1992), titre proposé par un de ses fils, Elisabeth Badinter dessine les contours flous d’un nouvel homme que notre siècle est en train d’inventer, pris pour un problème d’hésitation entre féminité et  virilité. Son regard est bienveillant pour les difficultés d’adaptation des hommes à cette conception nouvelle d’égalité entre les deux sexes.

Dans l’enfant de Parme (2006), elle relate l’expérience faite au XVIIIe s de l’éducation de Ferdinand, infant de Parme, fils de Louise-Elisabeth, l’une des filles de Louis XV.

Dans le Conflit, la femme et la mère (2010) elle définit le dilemme posé aux femmes auxquelles la société semble imposer le fait qu’elles doivent tout à leur enfant, ce qui peut faire reculer certaines devant la maternité ainsi que le constate dans la société allemande où le taux de natalité est extrêmement bas, les femmes refusant la charge d’un enfant pour préférer une activité professionnelle.

En 2016 dans Le pouvoir au féminin, elle observe la valeur inestimable de Marie-Thérèse d’Autriche qui eut à gérer trois vies : celle d’épouse d’un mari volage mais adoré, celle de mère de seize enfants et celle d’impératrice d’Autriche; aucun souverain n’a eu à relever de tels défis. Aussi Marie-Thérèse fait bien penser aux femmes du 21è siècle.

Citons encore : Les passions intellectuelles qui comprend trois livres : Désirs de gloire  (1999), L’Exigence de Dignité (2002), Volonté de Pouvoir  (2007) où les philosophes et les savants du XVIII e siècle vont mesurer les limites de leur pouvoir.

Maupertuis sera le 1er à vouloir s’emparer par séduction et désir de gloire de l’opinion publique qui s’éveille où Dalembert saura concilier être grand physicien mais aussi un philosophe en prenant en main L’Encyclopédie au côté de Diderot par son seul génie, sans appuis mondains.
Les conflits d’une Mère en 2020, Elisabeth Badinter revient sur les problèmes féminins.

Avec Robert, son mari : Condorcet, un intellectuel en politique soulignant que ce défenseurs des juifs, des noirs, des femmes était accompagné dans la vie par la célèbre Sophie aussi belle qu’intelligente qui sut épauler son mari.

Nous pouvons être fières de cette intellectuelle qui a su éclairer notre vision sur les efforts nécessaires à plusieurs générations de femmes pour parvenir à choisir leurs voies dans une société qu’elles ont su faire progresser.

Monique COLLOT
Club de Saintonge

Editrice Marie-France Baron - octobre 2021